La révolution numérique qui nous attend (1/2)

Avez-vous entendu parler de ChatGPT?

Si vous n’avez pas d’ados au lycée, voire au collège, si vous n’êtes pas enseignants alors il est peu probable que vous ayez entendu parler de cette intelligence artificielle en passe de “révolutionner” le travail scolaire.

ChatGPT est un en effet l’outil à la mode chez les élèves de Collège et du Lycée. Demandez-lui ce que vous voulez, il vous l’écrit, le rédige dans un style totalement bluffant.

J’en ai fait l’expérience et lui ai demandé de m’expliquer pourquoi le Japon avait capitulé en 1945, c’est-à-dire une information simple. Je ne me suis pas arrêté là, et lui ai demandé de me rédiger un quatrain à la façon de Khayyam, c’est-à-dire d’être créatif par imitation. Et je lui ai même posé une question de nature philosophique: “peut-on tout juger?” c’est-à-dire nécessitant le traitement d’une problématique.

Les réponses, comme vous pouvez le constater, sont de qualité en tout cas pour ce que l’on peut attendre d’un travail d’élève. Ces derniers ne s’y trompent pas et désormais ils sont de plus en plus nombreux à consulter la machine pour répondre à leur devoir maison. Couplé à d’autres outils comme www.paraphraser.io ils arrivent à rédiger dissertations, exposés sans engager leur réflexion personnelle, sans être concernés par la question posée, sans se copier les uns les autres en fournissant la même réponse copiée-collée. Le travail à la maison se retrouve donc totalement contourné et totalement dépassé par ce progrès de la technologie.

Mais qu’est ce que cet étrange outil? Lorsqu’on lui pose la question, voici ce qu’il nous répond : “Je suis un modèle de langage informatique conçu par OpenAI. Mon but est de pouvoir répondre aux questions et fournir de l’aide aux utilisateurs en utilisant mon apprentissage automatique et mes connaissances en langage naturel. J’essaie de fournir des réponses précises et utiles aux utilisateurs. Je suis un outil de traitement de langage naturel et je n’ai pas d’opinions personnelles ni de préférences”.

ChatGPT fonctionne avec plusieurs algorithmes ultra puissants, capables d’agglomérer une quantité colossale d’informations, des données textuelles en plusieurs langues, des œuvres classiques, des ouvrages d’histoire etc. Plus qu’un simple “bot” habilité à mener des conversations guidées, ChatGPT fait partie des IA génératives, capables de produire un contenu cohérent et structuré dans un langage très proche de celui que peut tenir un être humain, votre proche.

Lancé le 30 novembre dernier dans sa version gratuite, le modèle de ChatGPT constitue une véritable révolution numérique qui entraînera par voie de conséquence d’autres révolutions, notamment une révolution pédagogique que nous devons sans plus attendre préparer.

Alors nous l’avons dit, fini les “devoirs maison”, fini cette époque où il fallait se creuser les méninges, relire son cours, son manuel, demander conseils aux enseignants documentalistes pour augmenter sa réflexion d’une lecture éclairante. Fini le temps de la rédaction solitaire, les pages de brouillons noircies au crayon à papier, chiffonnées par la déception de n’avoir pas fait coïncider son travail avec l’attente qu’on s’en fixe.

Demandez à ChatGPT ce que vous voulez, il vous répondra : une recette de cuisine, une problématique, et même un code informatique !

L’usage de cet outil pose de nombreuses questions. Celle du travail individuel de l’élève bien sûr, mais au-delà, elle interroge sur la culture de l’esprit et l’exercice de la pensée critique. Car en devenant une source complète, perçue comme fiable, rapide et immédiatement disponible, l’outil semble abolir la nécessité de lire, de comparer, d’analyser, de réfléchir et de questionner par soi-même. En ce sens, et sans prendre une posture technophobe, il semble mettre en danger ce qui fait la vie intellectuelle des élèves (et des autres aussi) en s’appuyant sur une tendance à la paresse. Or c’est cette même paresse que nous pédagogues, nous combattons en cours, dans nos leçons, dans les devoirs que nous donnons. Alors que la paresse nous laisse avec nos illusions, nous faisant miroiter un “bon sens”, le travail nous oblige à aller au-delà en fournissant un effort qui n’a rien de naturel. Regardons l’horizon que voyons-nous immédiatement : la terre est plate, voici sans effort l’état de nos “connaissances”, de la platitude !

Le savoir ne nous aide pas uniquement à dépasser nos intuitions, il nous permet de constituer au gré des lectures et des questions que nous rencontrons une véritable bibliothèque intérieure, boussole dans la vie qui nous permet d’en affronter les aléas. Comment réagiront les élèves face à ce que la vie leur réserve, saurons-t-il s’appuyer sur autre chose que des réponses toutes faites par d’autres, ou des émotions submergeantes?

OpenAI, fondé par Elon Musk et Sam Altman en 2015 bouleverse notre rapport au savoir. Spécialisée dans le développement d’intelligences artificielles en tout genre, son travail et investissement inaugurent un nouveau monde, une nouvelle révolution numérique. Le monde prédit par cette IA invite les acteurs éducatifs, et au premier chef l’Education nationale à développer de nouveaux outils, de nouveaux enseignements, d’humanité numérique par exemple afin que chaque humain garde une pleine maîtrise de la machine. Le développement de l’intelligence naturelle est plus que jamais mis au défi si nous ne voulons pas que la servitude numérique conditionne voire organise nos sociétés.

Hâkim Hallouch

Vous avez des questions ?

Contactez-nous !

Contactez-nous