Comment aborder et lire PISA

Après avoir résumé ce qu’était l’enquête PISA, nous pouvons essayer d’avoir un regard plus critique quant à la considération portée aux résultats des évaluations et au classement entre les pays participants. Comme nous l’avions souligné dans notre précédent article, les tests de PISA comparent et classent des pays qui sont fondamentalement différents dans leurs systèmes d’organisation et de politiques éducatives. De cet état de fait, les résultats peuvent être interprétés par chacun selon plusieurs prismes. Des performances avantageuses d’un pays, quel qu’il soit, seront au choix la conséquence de décisions politiques, de méthodes pédagogiques, d’un engagement économique important, de la qualité d’accueil et d’accompagnement des établissements, ou encore, des capacités des élèves à s’impliquer dans leurs apprentissages. Or, comme le souligne la chercheuse et professeure Marie Duru-Bellat, il est plus probable que tous ces facteurs interviennent dans les performances des élèves, en plus du contexte historique et culturel des pays, rarement pris en compte dans les analyses de PISA1. De même enchérit la sociologue, si les experts chargés de créer les questions qui serviront à évaluer évitent autant que possible d’avantager quelconque pays par ces dernières, il n’en reste pas moins que ces choix sont faits par des organisations internationales qui privilégient certains indicateurs pour évaluer des « compétences pour la vie » dont le consensus n’est pas encore admis. 

Quant aux performances scolaires (qui ne sauraient être mises en corrélation avec une seule caractéristique d’un système scolaire), elles ne révèlent pas si les pays ayant les meilleurs résultats sont également ceux qui voient leur jeunesse s’intégrer et réussir dans leur vie d’adulte, aussi bien au niveau professionnel, que du bien-être. N’est-ce pas une question tout aussi importante ? Ainsi, les études menées par PISA ne sauraient servir de prescription en matière d’éducation : elles servent tout au plus de points de vigilance sur des sujets bien spécifiques comme l’écart des scores en mathématiques entre les filles et les garçons, ou encore, la différence de performance entre les populations issues de l’immigration et celles établies plus antécédemment. Les résultats donnent à voir les effets dûs aux inégalités2

Il convient aussi de rappeler, qu’à sa lecture, on ne peut omettre que les données présentées sont issues des échantillons plus ou moins représentatifs d’une moyenne. Le classement entre les pays, élément le plus médiatisé, doit donc être abordé avec prudence puisqu’il persiste une marge d’incertitude quant aux résultats. En conséquence, les écarts entre les pays dans les performances ne doivent pas être considérés comme étant parfaitement significatifs à la lumière des éléments abordés ci-dessus. Par exemple, en prenant en compte les erreurs d’échantillonnage (c’est-à-dire les intervalles de confiance), un score de 496 en culture mathématique signifie qu’il se situe entre 489 et 503, soit 14 points d’écart. Enfin, les échantillons de PISA ne sélectionnent que des élèves de 15 ans, indépendamment de leur niveau scolaire. Ce faisant, plusieurs catégories d’élèves ne sont pas représentées par l’étude. Qui plus est, cette sélection met sur le même niveau des organisations scolaires et éducatives qui ne sont pas similaires : des éléments comme le redoublement ou l’orientation prennent forcément une place d’importance dans les performances des élèves. 

Au tout début des enquêtes PISA, lorsque les premières données ont été rendues publiques en l’an 2000, certains pays comme la France ou l’Italie n’ont prêté guère plus d’attention aux résultats, du moins jusqu’à ce que les organes médiatiques s’emparent du sujet. Avant PISA, d’autres données avaient plus d’importance :  le nombre d’étudiants diplômés du secondaire, le nombre d’inscrits à l’université3. Si PISA occupe cette place de référence, c’est surtout parce qu’elle permet à des quantités de canaux de communication de mettre en avant les résultats des pays et de les comparer d’une édition sur l’autre, alors que ce n’est pas là sa fonction première. C’est aussi parce les scores recueillis permettent de suivre les performances d’un pays d’une édition à l’autre et que l’ensemble des études mettent l’accent sur les compétences des élèves, et surtout sur leurs capacités à utiliser les savoirs académiques pour répondre à des situations de la vie quotidienne avec des résultats compréhensibles pour quiconque essaye de s’y intéresser, et tout ceci gratuitement. 


 


 

1 https://www.sciencespo.fr/osc/fr/content/comment-lire-la-prochaine-enquete-pisa

2 https://theconversation.com/comment-les-enquetes-pisa-sont-devenues-incontournables-70443

3 https://theconversation.com/comment-les-enquetes-pisa-sont-devenues-incontournables-70443

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